
Nous nous sommes inspiré d’un excellent ouvrage, « hypnose clinique et principe d’analogie », des auteurs Antoine Bioy et Pascal-Henri Keller, pour présenter différents modèles de réflexion qui sous-tendent l’hypnose. Ces modèles, selon nous, ne s’opposent pas, mais parlent à chaque fois de certaines facettes de l’hypnose. Nous vous présentons dans la suite de cet article, ces différentes théories qui se sont construites au cours de l’histoire :
Dans un premier temps, l’hypnose c’est une technique qui travaille avec le magnétisme. Dans le modèle de Mesmer, le corps est un fluide. Il nous donne l’impression qu’il est solide, alors qu’il est composé majoritairement d’eau et de sang. Cette fluidité signifie que le corps est un tissu d’interaction entre des éléments. Le corps est comme un véhicule qui transporte et génère beaucoup d’énergie. Et comme dans une grande ville, il peut y avoir dans certaines parties du corps des embouteillages. L’énergie est alors bloquée. Il faut alors remettre en place la circulation en vue de favoriser les conditions de notre survie. L’énergie est aussi une source d’attraction. Nous parlons d’ailleurs de personnes solaires, ce sont des personnes qui dégagent beaucoup d’énergie. Elles ont un pouvoir d’attraction important. Attention néanmoins, car certaines techniques d’hypnose ont été utilisées à des fins de manipulation. L’hypnotiseur utilise son charme pour faire oublier la part que l’hypnotisé prend dans le sommeil-hypnotique.
Dans un deuxième temps, l’hypnose a été pensée à partie du somnambulisme. Nous sommes ici dans le modèle du coaching. L’hypnotiseur induit un état proche du sommeil en vue de suggérer des pensées qui vont avoir des effets sur le comportement humain. Ainsi, si nous suggérons des pensées et images positives durant l’hypnose, la personne augmentera plus facilement son estime personnelle en vue d’augmenter la qualité de sa vie. Dans ce paradigme, l’hypnose est un moyen pour se programmer à la réussite de ses examens, à être en pleine possession de ses moyens durant un entretien d’embauche. Attention, on ne réussit pas un examen sans avoir fait l’effort d’étudier sa matière! Il serait plus juste de dire que l’hypnose peut faciliter la réussite de l’examen.
Dans un troisième temps, l’hypnose a été comparée à un sommeil nerveux. Il est question alors d’induire un sommeil hypnotique par la focalisation de l’attention sur un point. En rétrécissant le champ de la conscience du sujet, la personne se coupe du monde extérieur, et laisse plus de place à son inconscient. L’énergie qui n’est plus utilisée pour traiter les informations extérieures est redirigée vers l’intérieur. Dans ce modèle, il s’agit d’activer la stimulation de la rétine . Cette dernière agit directement sur le cerveau en vue de provoquer des sensations de détente dans l’ensemble du corps. Cet endormissement ou engourdissement permet par exemple de diminuer les ressentis de la douleur et d’augmenter les sensations de plaisir. Cela ne remplace pas néanmoins d’autres approches de la douleur, car nous vivons la plupart du temps de manière éveillée.
Dans un quatrième temps, l’hypnose a été utilisée à des fins cathartiques. Elle permet d’aller rechercher certains souvenirs qui sont à l’origine des symptômes post-traumatiques. L’hypnose traite les souvenirs douloureux en vue de les placer dans une autre partie de la mémoire. Grâce à l’hypnose, la personne peut transformer un vécu douloureux, au lieu de rester fixée à cet événement. Attention néanmoins, à ce genre d’approche qui pense que les symptômes sont causés par un seul événement. La source d’un problème est souvent pluri-factorielle. Nous devons prendre la personne dans toutes les dimensions de sa vie pour soulager la personne en profondeur.
Dans un cinquième temps, l’hypnose est un moyen de créer un état pathologique. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas de rendre la personne malade. Elle permet par exemple de générer des symptômes hystériques (convulsion, paralysie, perte de certains sens) en vue de s’en libérer. L’hypnose fonctionne aussi avec le mécanisme de la dissociation. Il s’agit de lâcher son mental pour faire advenir l’inconscient. Les mécanismes de défense névrotiques, comme le refoulement, sont d’une certaine manière neutralisés pour libérer l’inconscient, les images, les fantaisies qui sont restés bloquées à l’intérieur de l’individu. L’hypnose est donc un moyen pour produire un état altéré de conscience à l’instar par exemple d’une hallucination. Il s’agit par conséquent d’un outil pour libérer les sources de créativité qui sont bloquées par le sérieux de la vie ordinaire.
Après cela d’autres modèles se sont développés pour décrire la relation qui s’instaure entre l’hypnotisé et l’hypnotiseur. L’hypnotiseur peut être perçu comme un sorcier, un chaman, un séducteur, un magicien… Certains parlent d’une relation amoureuse. Soit, le clinicien bien formé sait qu’il doit manier le transfert pour ne pas l’agir en thérapie. Il doit aider l’hypnotisé à prendre conscience des images qu’il projette sur son hypnotiseur. Il n’y a pas néanmoins de travail possible sans une relation de confiance avec l’hypnotiseur. Ce transfert est néanmoins relativisé en hypnose par l’importance que prennent les contenus de l’inconscient. Le but de l’hypnose, c’est que progressivement l’hypnotiseur soit presque oublié. Le sujet entre alors en dialogue avec son inconscient et découvre toutes les richesses de sa vie intérieure.
Jean-Philippe de Limbourg, psychologue clinicien, pratiquant l’hypnose à Liège